3.2.10

Egalité des droits vérité rationnelle et vérité de foi niées par les lefebvristes


Le fait de l’égalité de tous les humains en ce qui concerne leurs droits fondamentaux (1) est une vérité accessible à la raison, à l’esprit humain par ses propres forces.(théoriquement du moins) .C’est l’idée sur laquelle j'ai fondé ce blog.

Sortons pour une fois, du domaine purement rationnel et entrons dans le royaume de la foi catholique .

La foi en Jésus-Christ nous apprend que les hommes sont tous fondamentalement égaux, car la foi voit en tout homme un être que Jésus-Christ s’est uni selon un mode particulier, c'est-à-dire en partageant sa condition.

On connaît la prétention absurde des lefebvristes et autres sédévacantistes à être plus catholiques que le pape et à trouver des hérésies dans Vatican II et dans l’enseignement des papes à partir de Jean XXIII.

C’est un grand sujet pour les lefebvristes que de relever d’abord dans Gaudium et spes puis chez Jean-Paul II cette affirmation que "Jésus-Christ s’est uni à tout homme". Cette affirmation serait hérétique ou du moins erronée.

Prenons pour exemple le post du célèbre abbé Laguérie sur « Discussions doctrinales, qu’en attendre ? ».

Reprenant cette scie intégriste, notre abbé commente un texte qu’il attribue à Gaudium et spes :

«Jésus-Christ s’est uni, en quelque sorte, à tout homme par le mystère de l’Incarnation».

http://blog.institutdubonpasteur.org/spip.php?article111

Il commente cette citation inexacte :

« N’est-elle, au fond, qu’une admirable poétique qui aura anticipé, un peu iréniquement il est vrai, l’oméga sur l’alpha, Le Christ cosmique sur le Christ historique, dans un plérôme plus teilhardien que paulinien ? »

et il conclut sur cette interrogation typiquement lefebvriste marquée par les « exercices spirituels de saint Ignace » à la mode du Père Vallet, il conclut en se demandant si cette affirmation vaut aussi pour les damnés. Les damnés ne mériteraient aucun respect et Jésus-Christ ne se les serait pas unis.

Chez un autre lefebvriste, l'abbé Petrucci de la Fraternité sacerdotale saint Pie X on lit dans le même genre de littérature approximative :

"Puisque Jésus s’est uni en quelque sorte à tout homme, tout homme est donc déjà sauvé, qu’il soit chrétien, bouddhiste, musulman, athée... L'incarnation est la manifestation de la divinisation de l'humanité."

Comme son confrère Laguérie, l'abbé Petrucci 1) fait usage d'une citation hors du contexte, quand elle n'est pas erronée 2) opère une confusion entre le spirituel qui n'appartient qu'à Dieu et au fidèle (liberté de conscience) avec l'état de l'humanité du fait historique du partage de la condition humaine par Jésus-Christ. On remarque une nouvelle fois l'absorption du social dans le spirituel (comme dans la critique lefebvriste de Dignitatis humanae) déviation des fanatiques des "Exercices spirituels".

Sans doute aurait-il été possible à monsieur l'abbé Philippe Laguérie ou à monsieur l'abbé Petrucci de trouver une réponse à leur questionnement en (re)lisant les termes même de Gaudium et spes 22,2 :

« Car, par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme [30], il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché [31]. »

note 30 “Cf. Conc. de Constantinople III : « De même sa volonté humaine divinisée n’a pas été supprimée » : Denz. 291 (556). » note 31 Hébr 4,15.

Gaudium et spes 22,2

Hébr 4,15. "Car nous n'avons pas un pontife qui ne puisse compatir à nos faiblesses; au contraire, Il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre le péché." (la citation n'étant pas dans GS, j'ai pris la traduction Fillion du site magnificat)

Ce n’est pas le « mystère » de l’incarnation qui unit Jésus-Christ à tout homme. Ce n’est pas une question spirituelle, c’est une vérité historique de foi constatée par le troisième concile de Constantinople (680-381) et tirée du texte de la lettre de saint Paul (mort en 67) au Hébreux. Teilhard de Chardin n'est en rien responsable de cette affirmation. Les idées de Teilhard, c'est l'abbé Laguérie qui les invoque. Cette vérité concernant toute l'humanité et donc non sans conséquences sociales, ne préjuge en rien de la question spirituelle du salut de l'âme, qui est une autre question, d'un autre domaine du domaine personnel, individuel.

Voici le fait historique : Jésus-Christ en travaillant, en réfléchissant, en agissant, en aimant, en naissant d’une femme est devenu l’un d’entre nous. C’est de cette « sorte » qu’il s’est uni à tout homme : en vivant une vie d’homme. Et en rencontrant un être humain je rencontre quelqu'un que Jésus a uni à lui en partageant sa condition.

D’ailleurs, cette doctrine de Vatican II est déjà (outre les textes antiques) dans « Ubi arcano » du 23 décembre 1922, de façon encore plus nette et plus audacieuse et fondée sur un motif théologique puisqu'elle se rapporte au Christ-Roi :

« Car le règne du Christ établit et fait épanouir une certaine égalité de droits et de dignité entre les hommes, tous ennoblis du sang précieux du Christ »

C'est parce que Jésus-Christ a ennoblis "tous les hommes" et pas seulement les chrétiens« tous ennoblis du sang précieux du Christ » qu'ils sont égaux. Il ressort de cela que même les damnés sont « ennoblis du sang précieux du Christ » et que le règne du Christ loin d'établir une inégalité, rétablira une égalité de tous les hommes, quelles que soient leur croyances.

Il ressort surtout que l’égalité des humains est non seulement une vérité rationnelle, mais encore une vérité de foi fondée sur d'autres motifs plus élevés (le précieux sang et non plus seulement la condition commune). Le Christ, Notre-Seigneur Jésus-Christ s’est uni « tout homme » en cette façon 1) qu'il a partagé la condition humaine et 2) a répandu son sang pour tous les hommes.

Il convient donc à un chrétien militant du Christ-Roi de traiter tout homme comme un noble non seulement fait à l’image de Dieu, mais encore que Jésus s'est uni en partageant sa condition, et qu'il a ennobli de son sang, le sang d’un Dieu. Il convient de le traiter à avec un « grand respect » car « Dieu lui-même traite [l’homme] avec un grand respect ». (Rerum novarum de Léon XIII) quelles que soient ses croyances ou incroyances par ailleurs.

Mais pour traiter tous les hommes avec un "grand respect" il faut reconnaître 1) l'universalité de l'esprit humain qui a pour conséquence l’ordre naturel des droits de l’homme et 2) l’ordre surnaturel de Jésus-Christ qui veut régner sur tout homme quelles que soient ses croyances ou incroyances. Deux choses que nient les "traditionalistes" « catholiques » contre la Tradition et donc contre la raison et contre la foi. Cela n'est malheureusement sans conséquences pratiques. La génération de 1968 - toutes opinions confondues - doit l'apprendre.

Puissent les « discussions doctrinales » avec le Saint-Siège faire (r)entrer nos amis "traditionalistes" dans l’ordre naturel et surnaturel.

(1) Cette égalité fondamentale ne nie pas l'inégalité, elle aussi évidente, des droits contingents laquelle inégalité est aussi une condition nécessaire à la vie en société.

Aucun commentaire: