28.10.11

Où est le titre des professeurs du journal "La Croix" ?

Le très intéressant site "Paix liturgique" publie un article du journal "La Croix" contre les motu proprio du Pape "Summorum pontificum" et l'instruction "Universae ecclésiae".

Ce sont deux professeurs qui nous délivrent leur enseignement sur la liturgie dite de saint Pie V et la réforme de Paul VI :

"La mise en œuvre de la réforme liturgique aurait été caractérisée par de multiples erreurs et abus.
Il n’existe à ce jour aucune étude scientifique sur cette période et ces abus. Et qu’est-ce qu’un abus dans ce domaine ? Autant de nombreux prêtres étaient désarmés pour mettre en œuvre cette réforme, autant il est infondé de présenter les années 1969-1975 comme une vaste période de gabegies. La crise sociétale à partir de 1968 a provoqué dans l’Église un profond séisme et une grave crise d’identité. En attribuer la responsabilité à la réforme liturgique est un raccourci simpliste."

Ce passage est volontairement incohérent. Il commence par dire que l'on ne sait ce que sont les abus. Les abus, et ils le savent, nos auteurs, sont constitués par le non-respect des rubriques liturgiques éditées, ou autorisées par le Saint Siège. Leur argument est déjà un premier mensonge.

Vient ensuite une affirmation gratuite sur le caractère "désarmé" des prêtres. Les pauvres prêtres qui auraient eu besoin du secours de nos auteurs sans doute ! Mais cela ne veut rien dire, il n'y avait pas d'armes à avoir, il y avait des rubriques et des formules de prières à respecter (1). Puis, on passe à une autre question qui est "la crise sociétale" dont nos auteurs affirment gratuitement qu'elle avait des répercutions en matière liturgique.

Ils terminent enfin par une affirmation péremptoire gratuite :

"Le renouveau liturgique a été et reste source de progrès pour la vie de la grande majorité des catholiques."

Ce qui est hors sujet. Leurs affirmations semblent sous-entendre que le rite de saint Pie V va contre le progrès. Les positions du types de celle de Mgr Pozzo sont ignorées. Car le rite de Paul VI, même respecté, a implicitement été aussi source de régression pour tous.

Qu'il y ait des nuances théologiques, voire des oppositions théologiques entre les deux rites est possible. C'est même probable. Mais une nuance théologique ne donne aucun titre à l'exclusion de l'autre nuance par voie juridique. Il y a des nuances théologiques entre jésuites et dominicains, mais ces nuances n'excluent pas les uns au profit des autres. Il serait absurde de voir un dominicain décréter, sans discussion possible et au nom de "progrès" et de la "science", que la théologie jésuite doit être interdite par le Saint Siège ; et que si le Saint Siège ne la condamnait pas, il fallait condamner le Saint Siège à changer.

Le fond du problème est le respect de la liberté religieuse, des droits universels de l'homme au sein même de l'Église, comme l'avait demandé Paul VI(2). Or le droit à la liberté religieuse (3) interdit l'agressivité à l'égard d'une position théologique différente de la sienne. Il commande au contraire le respect de toutes les positions et de tous les rites compatibles avec la foi de Rome. ("Il ne s’agit pas de deux formes interchangeables." osent-ils écrire, sans aucune autorité, aucun titre juridique pour le faire). Cette liberté religieuse enlève à nos auteurs tout titre à accuser sournoisement le Saint Siège d'être "irresponsable" s'il ne se soumettait pas à leurs options et à leurs injonctions. Alors que personne pas même leur école théologique, ne peut s'annexer le Pape. Les rubriques liturgiques sont à respecter, parce que c'est le droit. Il faut respecter le droit des fidèles catholiques à avoir un rite catholique. Le "ritualisme" n'est donc pas à condamner, mais à louer car à l'inverse de l'arbitraire liturgique il respecte la liberté religieuse des catholiques, donc de la raison juridique (4).

(1) Selon les auteurs cependant, respecter des rubriques par souci du devoir et du respect des livres liturgiques, serait non pas louable mais relèverait d'un condamnable "ritualisme" (?)

(2) "Dans le désir de se convertir pleinement à son Seigneur et de mieux accomplir son ministère, l’Eglise entend manifester respect et souci des droits de l’homme à l’intérieur d’elle-même. Et l’Eglise a aussi acquis une conscience renouvelée de la place de la justice dans son ministère. Les progrès déjà réalisés en ce sens nous encouragent à poursuivre notre effort pour nous conformer sans cesse davantage à la volonté du Seigneur.

L’Eglise sait d’expérience que le ministère de la promotion des droits de l’homme dans le monde l’oblige à un constant examen et à une incessante purification de sa propre vie, de sa législation, de ses institutions, de ses plans d’action. Le Synode de 1971 disait : « Quiconque ose parler aux hommes de justice doit d’abord être juste à leurs yeux ». Conscients de nos propres limitations, de nos déficiences et de nos échecs, nous pouvons mieux comprendre les manques des autres, institutions aussi bien que personnes. Dans l’Eglise comme dans les autres institutions ou groupements, il faut travailler à purifier les modes d’agir, les procédures ; il faut purifier aussi les relations que l’on peut avoir avec des structures et systèmes sociaux fauteurs de violations des droits de l’homme qui doivent être dénoncées."

http://www.clerus.org/clerus/dati/2002-06/06-6/Ens_P6_74_02.htm

(3) Dignitatis humanae : "Ce Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être exempts de toute contrainte de la part tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres. Il déclare, en outre, que le droit à la liberté religieuse a son fondement réel dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la Parole de Dieu et la raison elle-même."

(4) La liberté religieuse est inhérente à la nature humaine et comme telle s'impose à l'Église et même aux professeurs. Nos professeurs n'ont pas de titre à condamner l'obéissance aux livres liturgiques. Selon eux cette obéissance ne seraient valable que moyennant de nombreuses conditions préalables édictées par... eux-mêmes. Soumettant arbitrairement le droit liturgique et le célébrant à des conditions spirituelles alors que ces conditions seraient-elles valables, ne peuvent avoir de conséquences juridiques.

Aucun commentaire: