13.2.15

« Sans explication raisonnable »

Campagne briançonnaise
Trouvé sur le Forum catholique un article de Jean Madiran de 2012:

« Considérer l’histoire récente de l’Eglise d’un point de vue contre-révolutionnaire lui apporte un éclaircissement supplémentaire. En effet, savoir si Vatican II marque ou non une rupture théologique est une question disputée que le magistère ne paraît pas avoir décisivement tranchée. Mais la rupture avec la contre-révolution, tous les fidèles peuvent la constater comme un fait évident. La démocratie obligatoire, la laïcité de séparation, la socialisation, les droits de l’homme sans Dieu (DHSD), avant-hier rejetés comme ils le méritent, sont aujourd’hui acceptés avec de moins en moins de réserves, et sans explication raisonnable d’un tel tête-à-queue. »
Robespierre et Danton écoutant Marat exposer son programme (Musée de la Révolution Vizille)


D'une part, il semble bien que le magistère a conclu que Vatican II n'apportait pas de « rupture théologique », mais qu'il fallait interpréter Vatican II dans un sens de continuité de la doctrine immuable.

Benoît XVI dans son discours du 22 décembre 2005 après avoir rappelé l'enseignement de Jean XXIII et de Paul VI le confirmait en ces termes:

« Il est clair que dans tous ces secteurs [rapports de l'Église et de l'État, foi et science moderne, interprétations de la Bible...] dont l'ensemble forme une unique question, pouvait ressortir une certaine forme de discontinuité et que, dans un certain sens, s'était effectivement manifestée une discontinuité dans laquelle, pourtant, une fois établies les diverses distinctions entre les situations historiques concrètes et leurs exigences, il apparaissait que la continuité des principes n'était pas abandonnée - un fait qui peut échapper facilement au premier abord. C'est précisément dans cet ensemble de continuité et de discontinuité à divers niveaux que consiste la nature de la véritable réforme. »

Ensuite sur la démocratie « obligatoire » qui figure en effet dans la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 (article 21.3), Jean XXIII a enseigné dans Pacem in terris que :

« 144 - Nous n'ignorons pas que certains points de cette Déclaration ont soulevé des objections et fait l'objet de réserves justifiées. »

La stratégie papale est donc d'ignorer ces "réserves justifiées" soient les erreurs qui figurent dans les documents de l'ONU. Les papes ne traiteront que des aspects valables de la Déclaration de 1948 et ils ne s'appuieront que sur eux. Probablement parce que les aspects condamnables sont adventices, sans importance centrale dans la doctrine imparfaite de l'ONU.

Sur la « laïcité de séparation » qui serait plus justement nommée, selon moi, « laïcité d'exclusion », le cardinal Bertone, repris par le cardinal Mamberti ont donné les arguments dirimants sur cette question. (Voir mon blog)

Sur la "socialisation", Madiran confond la socialisation avec le socialisme. Le socialisme reste condamné. L'État et la communauté doivent respecter la vie privée et les libertés individuelle et sociale. La "socialisation", c'est l'œuvre commune de l'humanité qui ne peut être menée à bien seul, mais seulement en société, c'est aussi la mise en pratique de la fraternité humaine (fraternité en Adam et Ève et en Jésus-Christ). Voir le Compendium 94 et 151. Il n'est pas très honnête de faire semblant de confondre socialisme avec socialisation.

Enfin sur les droits de l'homme, les droits de l'homme sont conférés directement par Dieu à chaque individu, dès sa conception. Ces droits sont évidemment inséparables des devoirs. Le droit est la version positive du devoir. Si j'ai des droits et que les autres ont les mêmes droits, il s'ensuit que nous avons tous des devoirs négatifs et positifs les uns envers les autres. Il n'y a donc pas lieu à opposer droits de l'homme sans Dieu et droits de l'homme fondés sur la volonté divine. Que des athées, par inconséquence, approuvent les droits de l'homme, il ne s'ensuit pas que les droits de l'homme sont à condamner. Il n'y a pas, il ne peut y avoir de droits de l'homme sans Dieu. (voir Compendium en particulier 153). Le fait que Dieu ne soit pas mentionné dans les documents de l'ONU n'empêche pas de faire remarquer que les droits de l'homme sont fondés en Dieu.

La prose de monsieur Madiran impressionne. Mais, à l'examen, elle n'est pas sérieuse. Elle fut pourtant à la base du lefebvrisme et du sédévacantisme et probablement de la perte, au moins terrestre, d'un grand nombre de destinées et d'apostasies. Il n'y a pas de tête à queue et il n'y a pas absence d'explications raisonnables. L'Église reste l'Église, hier, aujourd'hui et demain.

Aucun commentaire: